La Sologne est une région naturelle de près de 500 000 hectares, située dans le centre de la France et délimitée par les vallées de la Loire au nord et à l’ouest, du Cher au sud, et les marnes du Sancerrois vers l’est. Les auteurs qui ont étudié la Sologne évoquent fréquemment les disparités de la documentation, liées à l’absence de ville importante et à la couverture végétale forestière et aux biais qu’elles impliquent. Les recherches qui se succèdent depuis le début du XIXe siècle donnent effectivement une image particulière des occupations de la Sologne. L’étude de ce territoire souffre probablement de la rareté des fouilles, en particulier au centre et à l’est. Ce territoire ne semble jamais avoir constitué une unité administrative.
Dès la période antique, il est divisé entre les cités carnutes et bituriges, puis à partir de la première moitié du IVe siècle, entre le pagus Aurelianensis (chef-lieu : Aurelianum/Orléans) et le pagus Bituricus (chef-lieu : Avaricum/Bourges). Aux périodes médiévales, cette répartition persiste puisque les diocèses reprennent au moins en partie le tracé des frontières antiques. Sur le plan féodal, la Sologne est répartie entre de multiples seigneuries, appartenant notamment au roi et au comte de Blois. A la suite des guerres le pays était presque en friche et des brigands infestaient le pays.
Au milieu du 15ème siècle, Romorantin passa sous le contrôle de Jean d’Angoulême. Sous son influence puis de celle de son fils Charles père du futur François 1er, et du duc d’Orléans le futur Louis XII le pays se redressa peu à peu et connut une grande prospérité. D’autres grands seigneurs participèrent à l’épanouissement de la région, comme Jean du Thier, seigneur de Beauregard, la famille de Beauvilliers à la Ferté Hubert, et le seigneur de Cheverny. Pendant cette période de prospérité, les bourgeois qui s’étaient enrichis prirent une part de plus en plus active dans l’administration de la région. De grands travaux d’urbanisme furent ainsi entrepris à Romorantin au début du 16ème siècle avec l’aide de François 1er. La situation privilégiée de la Sologne, entre Tours et Bourges, attirait de nombreux seigneurs qui construisirent des châteaux , Beauregard, le château du Moulin à Lassay, Chèmery, et de belles demeures rurales, La Morinière, Lamotte. François 1er voulut développer la culture de la vigne et, en 1517, il fit planter 80.000 ceps de Beaune qui donnèrent naissance au cépage de Romorantin. Il fit également améliorer le cours de la Sauldre. Les travaux les plus remarquables concernèrent les étangs qui furent aménagés en grand nombre. Léonard de Vinci établit même un projet de drainage et d’irrigation de la Sologne, mais il mourut en 1519 et le projet fut définitivement abandonné. La culture se développa mais les propriétés étaient essentiellement de petite taille. La Ferté Hubert était réputée dans tout le royaume pour ses oignons.
La Loire et le Cher représentaient d’importantes voies de communication et le commerce était florissant. Les marchés de Blois, Contres et Romorantin étaient très fréquentés. Il y avait aussi de grandes foires comme à la Ferté-Avrain, Ville herviers près de Romorantin, et à Bracieux où se tenait une importante foire aux porcs. Le servage disparut presque totalement, et des "coutumes" furent rédigées pour codifier les rapports entre les hommes et limiter les pratiques arbitraires.
Le protestantisme se développa lentement dans la région, sous l’influence de prédicateurs et aussi de Marguerite de France à Bourges. En dépit de quelques exécutions sur le bûcher, le culte subsista et fut progressivement adopté par un grand nombre de gens. L’Édit de Romorantin fut promulgué en 1560, afin de tenter de ramener le calme et diminuer les persécutions ; mais les massacres reprirent rapidement. Meurtres et pillages se succédèrent, l’abbaye du Lieu à Lanthenay fut saccagée, et de nombreuses églises profanées. Saint-Aignan puis Selles et Chabris tombèrent aux mains des Huguenots. La région fut dévastée entre 1567 et 1572, tandis que la population terrorisée s’efforçait de se protéger soit par les armes, soit par des présents.
Les caractéristiques des sols de Sologne semblent contraindre la population à des conditions de vie particulièrement difficile. Aux XVIIIe et XIXe siècles, plusieurs auteurs donnent une piètre image de ce pays et de ses habitants. Les difficultés semblent plus importantes en Sologne qu’en bien d’autres lieux de France aux XVIIIe et XIXe siècles. Ainsi, le paludisme, transmis par les moustiques dont les larves se développent dans les eaux stagnantes des étangs, paraît particulièrement virulent. De même, la dysenterie semble conduire une partie de la population de la vie au trépas. Même les animaux sont touchés : Pierre-Marie-Sébastien Bigot de Morogues mentionne des épizooties régulières, comme « la maladie rouge ». Les landes sont également favorables au développement des loups : jusqu’à la fin du XIXe siècle, des battues sont organisées pour tuer ces animaux. Souvent, les érudits relatent une histoire où les populations ne font que survivre. Louis Gallouédec écrit : « tout le passé de cette région ne comprend qu’une suite de vicissitudes pendant lesquelles elle passe d’une prospérité toujours assez médiocre… à la plus profonde misère ». Le paysage de Sologne a beaucoup évolué depuis le début du XVIIIe siècle. À cette date, il est largement dominé par les landes de bruyères et de genêts où paissent des moutons. Les terres cultivées sont rares, et il convient ensuite de les laisser reposer pendant 3, 6 ou 9 ans, voire plus, afin qu’elles se régénèrent. Ce n’est qu’à partir du Premier Empire, puis au Second, que les plantations d’arbres se développent et donnent le paysage que l’on connaît actuellement. Il se caractérise par des espaces boisés associés à de grands domaines, par la présence de nombreux étangs et par un habitat dispersé : essentiellement des villages et de rares habitats isolés. C’est un territoire qui contraste énormément avec les régions alentour : la Loire (la « vallée des rois »), la Beauce (le « grenier de la France »), la Touraine (« le jardin de la France »), mais également le Berry.
Traversant la Sologne en 1787, le voyageur et agronome anglais Arthur Young avait été frappé par la pauvreté de la contrée et par la situation qu’il jugeait désolante de son agriculture aux rendements très faibles avec une énorme part de marais et de landes. Un siècle plus tard le tableau est tout autre. La Sologne s’est rapidement modernisée, la misère a reculé sensiblement. Mieux même, cette partie méridionale des départements du Loir-et-Cher et du Loiret se situe au-dessus de la moyenne nationale par exemple dans le domaine de la santé et de l’espérance de vie. La Sologne connaît une série de progrès évoqués par petites touches impressionnistes sans qu’on puisse ressentir véritablement une « révolution agricole ». Les transformations locales, n’ont, en apparence, rien d’exceptionnel mais leur accumulation finit par déclencher une spirale positive. Les améliorations agricoles sont décisives dans la mutation de cette contrée. Sa consommation réduit celle de pain de seigle et le terrible fléau de l’ergot qui l’accompagnait. Le bétail est mieux sélectionné, notamment les moutons. L’assèchement des marais est facilité par la plantation de pins. Les moustiques, vecteurs du paludisme et des « fièvres » diverses, régressent fortement. Les terres cultivables sont bonifiées. Le chemin de fer d’Orléans à Vierzon, celui du Blanc à Argent et le canal de la Sauldre ouvrent le pays sur l’extérieur. L’habitat rural se transforme lui aussi. Du torchis on passe à la brique qui colore de manière pimpante le bâti des villages solognots. Les demeures sont mieux isolées et mieux protégées des sources d’infections. Tout cela a pour conséquence directe un recul de la mortalité, très marqué entre 1820 et la première guerre mondiale. Ce ne sont guère cependant les progrès médicaux qui marquent la Sologne. Le recours au médecin est rare. Les ruraux consultent prioritairement les rebouteux ou « panseux », récitent des prières, font des pèlerinages ou des « voyages ». C’est donc une meilleure hygiène qui a d’abord caractérisé la vie quotidienne en Sologne et a fait triompher la vie. En trois-quarts de siècle la population a augmenté de 46 % passant de 107 000 à 156 000 habitants. Du mouroir de l’Ancien Régime (le double de la moyenne du royaume !) on rejoint les normes françaises. Mieux même, à la veille de la première guerre mondiale, la Sologne connaît de meilleurs résultats que l’ensemble national. Quant à la natalité, elle reste plus élevée que dans le reste du pays, ce qui explique cette poussée rapide du peuplement.